Depuis 1981 une partie de l’unité Inserm 953 effectue un travail de veille, d’analyse et de recherche sur les malformations congénitales dans la population de Paris et de la petite ceinture (92, 93, 94), dans le cadre du « Registre des malformations congénitales de Paris ». L’équipe du registre a rendu publique une brochure rapportant leur activité des 27 années passées : 27 années de prévalence des malformations et des anomalies chromosomiques, 27 années d’évolution et d’évaluation du diagnostic prénatal. Le document est téléchargeable sur le site de l’U953.
La brochure présente l’historique et les objectifs du registre, rappelant que l’origine de nombreux registres de malformations provient du choc causé par la Thalidomide au début des années 60, conditionnant ainsi une des missions premières de ces registres : assurer la veille sanitaire en surveillant l’évolution des anomalies congénitales et leur lien potentiel avec l’utilisation de médicament, des accidents industriels ou autres facteurs environnementaux. Rapidement le registre s’est attaché à l’évaluation du dépistage échographique des anomalies congénitales, chromosomiques ou non. Ces types de travaux sont toujours d’actualité puisque les techniques et les politiques de dépistage changent, notamment en ce qui concerne la trisomie 21, et qu’il est donc toujours nécessaire de les évaluer. L’actualité des découvertes médico-scientifiques, montrant dès la fin des années 60 que la carence en acide folique peut provoquer des anomalies du tube neural, a mené le registre à s’intéresser aux politiques de prévention adoptées dans différents pays, et donc à en évaluer les effets. De la même manière, les techniques d’aide médicale à la procréation (AMP) ont été suspectées d’accroitre des risques de malformations, le registre s’est donc saisi du sujet pour fournir des données fiables. Enfin le registre a mis un accent particulier sur l’évaluation de l’impact du diagnostic prénatal et du devenir des enfants porteurs de malformations cardiaques, ces malformations étant les plus fréquentes. Dans ce cadre l’étude EPICARD (EPIdémiologie des enfants ou fœtus porteurs de CARDiopathies congénitales) a débuté en mai 2005 et doit se poursuivre au moins jusqu’en 2011 (financement PHRC).
Les auteurs rappellent que chacun de ces sujets de recherche s’inscrit dans des objectifs généraux du registre, tels que (1) la veille épidémiologique dans un but d’alerte face à d’éventuels agents tératogènes de l’environnement, (2) l’évaluation de l’impact des actions et politiques de santé en termes de diagnostic prénatal ou de prévention, (3) la réalisation d’études collaboratives avec les services cliniques spécialisés, (4) la contribution à la recherche étiologique portant sur les malformations rares, et enfin (5) la participation à des groupes de travail et d’expertises (HAS, AFSSAPS, Agence de Biomédecine, Comité National des Registres).
Le rapport offre ensuite un aperçu global des données recueillies entre 1981 et 2007 concernant le nombre et le type d’anomalies congénitales diagnostiquées et constatées, l’évolution des chiffres du diagnostic prénatal et des interruptions médicales de grossesses, celle des types d’examens pratiqués en diagnostic prénatal ou dans des cas de mort-nés ou d’IMG.
En 27 ans, le registre a pris en compte 1 012 271 naissances ayant eu lieu à Paris, les mères résidant à Paris ou dans la petite ceinture. Les IMG ayant eu lieu à Paris ont aussi été prises en compte dans ce chiffre. Le premier chiffre remarquable est le pourcentage de mères de 35 ans et plus, qui a plus que doublé en 27 ans, alors que celui des mères de moins de vingt ans est passé de 3% à 1%. Cette évolution peut être une des explications du doublement des malformations constatées (752 en 1981 et 1439 en 2007), l’âge maternel influant sur le risque d’anomalie chromosomique. Un autre facteur envisagé est le progrès du dépistage prénatal permettant la détection d’anomalies internes (rénales ou cardiaques, par exemple) qui auraient pu passer inaperçues voire même provoquer un avortement spontané non enregistré dans le registre. Ce doublement des malformations constatées s’accompagne d’un accroissement considérable des cas diagnostiqués au stade prénatal, passant de 16,5% en 1983 à 70,7% en 2007. Parallèlement le nombre d’IMG est passé de 38 (9%) à 514 (71%), elles concernent les anomalies sévères telles que les anomalies chromosomiques et neurologiques. Une observation des appareils fonctionnels touchés par les anomalies révèle une augmentation importante – entre 1981 et 2007 – des malformations cardiaques (de 15% à 30%) et des malformations urinaires (de 5% à 16%), les anomalies chromosomiques passant de 10% à 23%.
Parmi les cas de malformation la fréquence des examens cytogénétiques prénatals n’a augmenté de manière importante qu’à partir de 1990 jusqu’à un plateau atteint en 2004 avec 61% du total des cas. L’examen est le plus souvent réalisé par amniocentèse, les biopsies du trophoblaste atteignant tout de même 13% du total en 2007.
Finalement les auteurs proposent une information plus complète pour 21 anomalies congénitales. La liste de ces anomalies a été établie sur la base de la liste retenue en 1996 par la coordination des registres français de malformations. L’extrophie vésicale a été exclue de cette liste en raison d’un trop petit nombre de cas, l’atrésie ano-rectale et le syndrome de Turner ayant été rajoutés. Les 21 anomalies retenues sont donc :
- 15 anomalies morphologiques: anencéphalie, spina bifida, fente labiale, fente palatine, tétralogie de Fallot, hypoplasie du coeur gauche, transposition des gros vaisseaux, atrésie-sténose de l'oesophage, atrésie du grêle, atrésie ano-rectale, agénésie rénale bilatérale, réduction de membre (transverse), hernie diaphragmatique, omphalocèle, laparoschisis
- 5 anomalies chromosomiques: trisomie 21, trisomie 18, trisomie 13, triploïdie et syndrome de Turner
- 1 syndrome génétique: l'achondroplasie
D’un point de vue méthodologique, la définition des prévalences correspond aux standards internationaux utilisés par les réseaux européen – EUROCAT – et international – ICBDSR – auxquels appartient le registre parisien depuis 1982. Les facteurs susceptibles de biaiser la prévalence de certaines anomalies sont aussi discutés spécifiquement dans ces 21 fiches.