A l’occasion des 15 ans de l’Alliance Maladies Rares, OrphaNews France a réalisé une interview de son président, Alain Donnart, et de sa vice-présidente, Viviane Viollet.
OrphaNews France : Quelle était la situation dans le milieu des maladies rares il y a 15 ans ? Expliquez-nous ce qui a entraîné la création de l'Alliance Maladies Rares.
Viviane Viollet : L’Alliance Maladies Rares a été créée il y a 15 ans car il existait des associations isolées et faibles en nombre représentant diverses maladies rares. Bien que différentes, ces associations, avec également la force de grosses associations telles que l’Association française contre les myopathies AFM-Téléthon, souhaitaient la même chose : interpeller les hautes instances telles que le ministère de la Santé et de la Recherche.
A la fin des années 90, l’AFM-Téléthon, dont le Président était Bernard Barataud, travaillait sur le génome humain. Parallèlement, sur la requête du ministre de la Santé Bernard Kouchner, un état des lieux a été demandé en France de tout problème de santé publique. En Ile-de-France, Bernard Barataud a ainsi contacté Bernard Kouchner en lui expliquant qu’en travaillant sur le génome humain, l’AFM-Téléthon découvrait beaucoup de gènes concernant d’autres maladies que les maladies neuromusculaires dont il ne savait pas quelle valorisation pouvait en être faite. Dans le cadre des États généraux de la santé, l’AFM-Téléthon, sous l’encouragement de Bernard Kouchner, a ainsi organisé le Forum citoyen « maladies rares » en 1999, réunissant 200 à 300 familles et représentants de personnes malades. A la fin de cette journée, plusieurs points communs sont apparus tels que l’isolement, une solitude intense, une errance diagnostique catastrophique, une prise en charge médicamenteuse inexistante et une recherche très faible. C’est la rareté qui faisait notre si grande souffrance. L’AFM-Téléthon nous a permis de commencer notre combat en nous procurant des locaux et en nous mettant à disposition deux de ses salariés, Yann Le Cam et Françoise Antonini, afin de créer un regroupement d’associations qui a abouti à la création de l’Alliance Maladies Rares le 24 février 2000. Il en a résulté l’écriture de la synthèse des Etats généraux de la santé comprenant 33 propositions, envoyée au ministère de la Santé et au ministère de la Recherche. Une très belle aventure était en train de démarrer.
OrphaNews France : Durant les 15 ans de cette aventure, quelles ont été les actions principales de l'Alliance Maladies Rares ?
Viviane Viollet : L’action principale de l’Alliance a été de rompre l’isolement. Les associations ont compris que la solidarité était nécessaire pour avancer. L’Alliance Maladies Rares a été accueillante, réconfortante et porteuse de projets : elle a formé les associations et leur a donné une méthodologie. Les maladies rares ont été reconnues comme une problématique de santé publique par le ministère, et c’est ainsi qu’un des axes de la loi de santé sortie en août 2004 a été consacré aux maladies rares. Cependant, cette loi était insuffisante. Nous avons donc été acteurs, aux côtés de l’AFM-Téléthon, de l’écriture du Plan National Maladies Rares 1 (PNMR1) 2005-2008. La force de l’Alliance était de représenter de nombreuses associations de maladies rares et d'être ainsi un interlocuteur de poids. L’un des points forts du PNMR1 a été la création et la labellisation des centres de référence afin de lutter contre l’errance diagnostique et de favoriser le diagnostic précoce. Les premières années de sa création, l’Alliance a insisté sur la pédagogie du doute afin que les médecins généralistes songent à une maladie rare lorsque des patients se présentent avec des signes chroniques et répétitifs. Grâce aux associations de maladies rares, un décloisonnement entre les professionnels, les représentants de personnes malades et les malades s’est opéré. Le rassemblement était nécessaire, et c’est ainsi que la Plateforme Maladies Rares est née, installée à l’origine dans les locaux de l’ancien hôpital Broussais. Elle était constituée de l’Alliance Maladies Rares, d’Eurordis, d’Orphanet, d’Allo-Gènes devenu Maladies rares info services, et d’un Groupe d’intérêt scientifique (GIS) devenu la Fondation maladies rares. Cette force associative et cette synergie des professionnels dans un même lieu ont servi de modèle au niveau européen. Aujourd’hui, il est important que les pouvoirs publics réalisent qu’il faut aider financièrement la Fondation maladies rares et tous les chercheurs, car sans eux, le malade ne peut pas guérir. Le PNMR2 2011-2014 a permis l’inauguration de la Fondation maladies rares, la structuration des 131 centres de référence et des 502 centres de compétence en 23 filières maladies rares pour donner une lisibilité dans le parcours de soin et de santé, et l’ouverture entre le sanitaire et le médico-social, encore séparés par un mur. La pluridisciplinarité est nécessaire et c’est l’orientation qu’il faudra prendre pour les cinq années à venir.
OrphaNews France : Quelles seront donc les priorités de l'Alliance pour les cinq prochaines années ?
Alain Donnart : Il y a eu une prolongation du PNMR2 de deux ans, mais quid d’un troisième plan ? Nous pensons qu’il est nécessaire de faire évoluer la recherche et d’impliquer d’avantage les associations de malades dans la gouvernance des centres de référence et des filières. L’Alliance aura besoin d’une équipe soudée et renforcée afin de s’attaquer à tous les problèmes concernant les personnes malades, que ce soit au niveau régional ou national. Nous avons conscience que le champ de travail est vaste et que les moyens de l’Alliance Maladies Rares sont relativement restreints, mais nous ferons en sorte de travailler avec toutes les personnes compétentes du champ des maladies rares. La prochaine Assemblée générale de l’Alliance qui se tiendra le 20 mai validera le nouveau plan stratégique. Des priorités spécifiques et des axes de travail ciblés en ressortiront. Quoi qu’il en soit, le combat contre les maladies rares ne s’arrêtera jamais.
OrphaNews France : En dernier lieu, pouvez-vous nous présenter les actions que l'Alliance a ou va mener afin de célébrer son anniversaire ?
Alain Donnart : Tout d’abord, nous avons organisé un événement qui a été riche en émotions : la réunion du premier Conseil national avec le dernier et actuel Conseil national de l’Alliance. Cela a permis au premier Conseil de voir le travail accompli. A cette occasion, Yann Le Cam, directeur général d’EURORDIS, a fait un magnifique discours expliquant pourquoi l’Alliance Maladies Rares existe. Cette journée a été un véritable succès. Ensuite, au cours de l’Assemblée générale, un gâteau d’anniversaire sera découpé pour les 15 ans de l’Alliance, et nous espérons avoir la visite officielle d’un ministre.
Un rassemblement des associations en famille sera également organisé en juillet à l’Hippodrome de Maisons-Laffitte sous forme de pique-nique. Toutes les personnes touchées par une maladie rare, ayant un proche atteint ou évoluant dans le domaine, et, adhérentes d’une association membre de l’Alliance, sont les bienvenues dans le cadre de ces courses hippiques où le grand prix de l’Alliance Maladies Rares sera couru.
De même, tout au long de l’année 2015, un témoignage qui a marqué nos esprits durant ces 15 dernières années sera publié environ toutes les trois semaines sur le site internet de l’Alliance. Ces témoignages de personnes malades, de parents ou d’aidants sont de véritables leçons de vie.
Enfin, dans plusieurs régions de France, les Régates Extraordinaires de l’Alliance Maladies Rares seront lancées le week-end du 11-12 juillet pour la première année, en collaboration avec les délégués régionaux, afin de proposer des petits défis nautiques à voile, à moteur, à pédale, à la rame, ludiques, détournés, « décalés ». Ces moments conviviaux seront préparés par – et faisant participer – des personnes touchées par les maladies rares et des personnes non concernées,
OrphaNews France souhaite donc un joyeux anniversaire à l’Alliance maladies rares !
Consulter les témoignages pour les 15 ans de l'Alliance Maladies Rares
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