Financement 2022 de la sécurité sociale (PLFSS)
Le Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’année 2022 (PLFSS 2022) a été présenté à la Commission des comptes de la Sécurité sociale le 24 septembre 2021. Il revient sur l’impact négatif (notamment financier) du Covid-19, tout en soulignant la bonne résilience du système de protection sociale. Parmi les multiples propositions avancées, qui sont plus ou moins nouvelles (certaines prolongent par exemple le plan d’investissement « France Relance », annoncé par le Ségur de la Santé), voici un aperçu de celles qui concernent, directement ou non, la communauté maladies rares.
En termes de répercussion sur la prise en charge quotidienne de la santé, on notera les 515 millions d’euros dédiés à l’équipement numérique (en dehors du cadre médico-social et hospitalier) et à son utilisation par les médecins de ville (via des incitations financières). De même, le PLFSS budgétise une augmentation inédite des dépenses liées aux produits de santé, ce qui représente une hausse de 2,4% par rapport à 2020 (soit 1 milliard d’euros). Cette hausse trouve son origine dans trois facteurs. Pour simplifier, elle vise à sécuriser l’accès aux médicaments essentiels, et à faciliter le développement des innovations thérapeutiques ainsi que leur accessibilité sur l’ensemble du territoire (pour plus de détails, cf. l'encart à la fin du présent article). Ces innovations, dont certaines sont dites « présumées », relèvent de produits onéreux déployés dans le secteur hospitalier, de traitements non éligibles à l’accès précoce, et de dispositifs numériques (par exemple les « DTx »). Le PLFSS s’inscrit ainsi dans les différentes composantes du plan « Innovation Santé 2030 » (depuis le financement de la recherche, jusqu’à l’accès aux soins ou encore l’organisation de l’Etat). Ce dernier est un plan d’investissement de 7 milliards proposé en 2021 par le Conseil stratégique des industries de santé (CSIS).
Quant au budget dédié au politiques du handicap, il marque une progression inédite de 4,7 % par rapport à 2020 (soit une hausse de 600 millions d’euros). Il se télescope ainsi avec la création d’une nouvelle branche de la sécurité sociale, la 5ème en date, déjà prise en compte dans le PLFSS 2021, et qui regroupe les budgets consacrés aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Hormis la hausse due à la revalorisation de l’Allocation Adulte Handicapé (depuis avril 2021) et du salaire des soignants du handicap (dès janvier 2022), le budget 2022 du PLFSS contribuera, entre autres, à:
- augmenter l’aide aux couples des foyers les plus modestes (réforme intégrant le revenu des conjoints).
- créer des services de soutien à la périnatalité ou à la parentalité des personnes en situation de handicap.
- recruter des assistants de projets et de parcours de vie pour accompagner les personnes et leurs familles, dans le cadre du réseau « Communautés 360 ». La structuration de ce réseau de professionnels est en cours, et un cahier des charges sera diffusé d’ici la fin de ce mois d’octobre.
- assurer la « garantie délai » des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH), et à résorber les retards accumulés dans le traitement des demandes. Ceci s’inscrit dans le cadre de la feuille de route « MDPH 2022 ».
Cette politique volontariste entre en résonnance avec la politique internationale du handicap. Dans le cadre de la mise en œuvre de la convention internationale des droits des personnes handicapées (suite au rapport 2016 de l’ONU), les Nations-Unies ont en effet auditionné la France, et ont salué son profil de leader européen. Le comité onusien en charge du handicap cite notamment les politiques sectorielles concernant les personnes atteintes de maladies rares. Pour autant, des recommandations restent à être accomplies, comme par exemple celle visant à donner plus de place à la parole des personnes en situation de handicap et à leurs représentants directs.
Les trois facteurs à l’origine de la hausse du budget 2022 dédié aux produits de santé
La hausse du budget envisagée par le gouvernement tient compte, premièrement, de l’empreinte industrielle liée à la reterritorialisation de la production destinée au marché national, soit une hausse de coûts dont la contrepartie est de limiter les ruptures de stock et les pénuries (suivant en cela le décret n° 2021-349).
Deuxièmement, la future hausse des dépenses est liée à l’élargissement de deux anciens dispositifs visant à rendre accessible l’innovation thérapeutique. Ainsi, au 1er janvier 2022, sera remboursée l’intégralité des innovations onéreuses qui sont déployées dans le secteur hospitalier, qui présentent un service médical important (effectif ou attendu), et qui délivrent une amélioration clinique reconnue par la Haute Autorité en Santé (HAS). De même, l’accès aux solutions innovantes est accéléré, ce qui complète la récente réforme de l’accès précoce, entrée en vigueur en juillet 2021, votée dans le PLFSS 2021, et visant à sécuriser l’accès à des solutions innovantes avant même leur autorisation de mise sur le marché (lorsque le besoin thérapeutique n’est pas couvert). Un nouveau dispositif expérimental sera ainsi déployé sur deux ans, afin de permettre aux patients d’accéder, sur avis de la HAS, à de nouveaux traitements non éligibles à l’accès précoce, mais qui présentent une amélioration du service médical rendu. Il s’agit de médicaments présumés innovants, dont la sécurité est fortement pressentie au regard d’essais cliniques, et qui sont utilisés pour une maladie grave, rare ou invalidante et sans traitement approprié.
Enfin, l’accessibilité accrue à l’innovation thérapeutique est étendue au champ du numérique dédié à la santé. En effet, la prise en charge de dispositifs présumés innovants sera anticipée. Les dispositifs en question feront l’objet d’un remboursement transitoire et temporaire d’un an, tandis que les entreprises fourniront, en parallèle, les données nécessaires à leur évaluation. Ils peuvent être). Ce nouveau protocole sera évalué, d’ici deux ans, via un rapport remis au Parlement. Les dispositifs concernés relèvent de la télésurveillance (lien patients-professionnels de santé), et des thérapies dites « numériques » (ou « DTx », acronyme anglo-saxon pour "digital therapeutics"), c’est-à-dire des solutions logicielles qui peuvent réunir trois fonctions (prévenir, gérer la prise en charger ou traiter une maladie).